μελαγχολία (melankholía) Création 2016

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« Ta pensée est trouble, ne trouves-tu pas ? Un peu comme une eau polluée par des particules d’ordure. C’est bien de l’eau pourtant, tu en es sûr, tu la bois, et tu te rends malade. L’ennui avec la pensée, c’est que tu ne te percevras pas malade, même asphyxié de symptômes. C’est la mélancolie. Ne t’inquiète pas : ta pensée, comme la fleur de la photo, est toujours en vie ! »                                                                          Stethias Deler

Mise en scène : Stethias Deler
Au plateau : Edith Baldy (comédienne), Cyril Laucournet (vidéo), Sylvain Stawsky (comédien), Phil Von (création sonore)
Régie lumière/vidéo/son : Stefan Delon & Mathias Beyler
Création lumière : Martine André
Scénographie : Daniel Fayet

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Premières réactions de la presse:
www.mouvement.net
www.jmdinh.net
www.idherault.tv

Représentations :
Les 03 et 04 novembre 2016 au Théâtre Jean Vilar-Ville de Montpellier
Le 02 février 2017 au Théâtre Le Périscope à Nîmes
Le 28 février et le 1er mars 2017 au Théâtre d’O, Montpellier dans le cadre du festival BIG BANG organisé par Humain trop humain-CDN de Montpellier

La création est coproduite par le Théâtre Jean Vilar-Ville de Montpellier, Humain trop humain CDN de Montpellier et le Théâtre Le Périscope à Nîmes dans le cadre d’une aide à la résidence. La création a le soutien du Domaine Départemental d’O, Montpellier et de l’ENSAD de Montpellier.

La création a reçu l’aide de la DRAC Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, du Conseil Régional Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, et de la SPEDIDAM.

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                                                                                                                                            LOGOS spedidam 2009Drac JPG LaRegionLanguedocRoussillon

 

 

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//////////////////////// LETTRE AU SPECTATEUR DE μελαγχολία (MELANKHOLIA)

Pas un seul d’entre nous n’est capable de résister, devant un texte ou un spectacle, à la tentation de dire ‘‘C’est du théâtre’’ ou bien ‘‘Ce n’est pas du théâtre’’, ce qui signifie que vous avez en tête une idée du théâtre parfaitement enracinée. Or, les nouveautés, mêmes totales, vous le savez suffisamment, ne sont jamais idéales, mais concrètes.
Pier Paolo Pasolini

Il y a plus de 2000 ans, un artiste anonyme sculpta un bronze qu’il intitula : La mélancolie d’Ajax. Ce guerrier de légende fut décrit par Homère comme l’équivalent d’Ulysse en valeur et en bravoure. Pendant le siège de Troie, après une dispute entre chefs grecs rivaux, il fut rendu momentanément fou par Athéna et massacra par vengeance un troupeau de moutons du camp, croyant tuer des chefs grecs. Sa raison recouvrée, il s’empala de honte sur son épée.

L’instant capté par l’artiste n’est pas, comme attendu, le désespoir d’Ajax (son suicide), ni sa folie meurtrière (le massacre des moutons), mais l’instant entre les deux états : il touche le pommeau de son épée d’une main et se tient la tête de l’autre (sa mélancolie). La mélancolie est, ici, un seuil. Un seuil entre deux états, entre deux moments. C’est la temporalité de notre spectacle, et peut-être celle du théâtre-même : un moment suspendu entre deux moments.

Nous avons travaillé autour du concept de mélancolie. Nous avons fait un travail de recherche artistique à travers l’histoire des arts et de la pensée depuis cette première oeuvre connue portant le mot mélancolie en passant par Aristote, Evagre le Pontique, Burton, Alfred de Musset, jusqu’à Freud, Lars von Trier, Stéphane Hampartzoumian, Ron Mueck, Rodrigo Garcia, etc.

La thématique de la mélancolie est tellement traitée par les artistes depuis l’Antiquité qu’une liste exhaustive serait probablement sans fin ! Plus simplement : qui n’a pas, un jour où l’autre, été mélancolique ? Personne. Pas même toi.

Quelles qu’en soient les définitions, on peut résumer la mélancolie à ceci : un état d’être caractérisé par la perte de l’élan vital, du goût pour autrui et les choses, par le désœuvrement et la morbidité ; et tout est fait pour la dissimuler derrière un voile vaguement moral ou médical parce qu’elle ferait souffrir et – dit-on -rendrait malheureux !  Pourtant elle est revendiquée par de nombreux artistes comme la source fondamentale de leur inspiration. Il semble que cet état soit nécessaire à l’acte créatif !
La mélancolie apparaît, semble-t-il, comme constitutive de ce que nous sommes…

Nous posons cette donnée comme postulat et t’invitons à nous accompagner dans cette prise de conscience.

Pier Paolo Pasolini formulait ainsi son idée du théâtre en 1968 (mon année de naissance) :
L’espace théâtral est dans nos têtes. Ici il n’y a pas de spectateurs : le théâtre est un. […]
Nous ne faisons pas théâtre si tu n’es pas là.
Le théâtre n’est pas un médium de masse. Même s’il le voulait il ne pourrait pas l’être.
Ici, nous sommes peu nombreux : mais en nous il y a Athènes.
Nous ne cherchons pas le succès.
Nous ne sommes pas nombreux parce que nous sommes tous des hommes en chair et en os.
Les corps ne sont pas aristocratiques.
Ne cherchez pas ici la spécificité du théâtre ni l’idée du théâtre. […]
Le théâtre est une forme de lutte contre la culture de masse.

Athènes en tête, nous avons répété comme on fait forum. L’équipe a longuement disséqué ce qu’était cette mélancolie occidentale, sa vision des choses. Et puis, deux semaines avant la première, nous avons tout laissé tombé : les auteurs, les penseurs, les peintres et les sculpteurs ! Nous allions devenir nos propres auteurs, nous enfouir dans nos propres possibles afin que nous échappe toute impression de maîtrise, ou de contrôle… et faire de la pensée du sensible. Nous attendons de toi, spectateur assis dans ce fauteuil, que tu fasses de même.
Nous faisons appel à toi. Ce n’est pas un spectacle interactif ou participatif : c’est le théâtre.
Cette recherche nous a poussé dans nos retranchements artistiques et ce que à quoi tu vas assister est pour nous le début d’une aventure de plusieurs années, nous l’avons compris.
Un journaliste a titré, à propos de cette ce travail : « Du risque de se revendiquer pitoyable ». C’est non seulement un beau titre, mais sans doute aussi le sentiment le plus proche de ce que nous éprouvons dans l’action. Ce que nous assumons joyeusement face à toi et donc face au monde, c’est nous-mêmes moins notre masque social c’est-à-dire pas grand-chose. C’est la mélancolie.

Devant toi, en direct, nous composons une ode à la mélancolie. Une composition instantanée avec ce qu’il faut de prévisible pour que l’imprévisible soit possible (quelque part tu as dû lire, quand tu achetais ton billet, que ce spectacle avait une durée déterminée… Il se peut que tu sois surpris…)
Stethias Deler

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Nous avons décidé, il y a 2 ans d’orienter la ligne artistique de la compagnie sur le concept de la mélancolie. Ce n’était alors qu’une vague intuition, une sorte de prétexte, mais depuis, Stefan Delon a mené avec des étudiants de l’Université Paul Valéry de Montpellier un travail de recherche autour du Lorenzaccio de Musset (NOTRE LORENZACCIO  présenté dans le cadre du festival In Vitro organisé par le CROUS de Montpellier, avril 2013) ; et dans le même temps avons fabriqué, à l’initiative de Mathias Beyler, un spectacle nommé STRIP-TEASE FORAIN, à partir du recueil éponyme de témoignages et de photographies de Susan Meiselas  sur des strip-teaseuses qui suivaient les foires agricoles sur la côte Est des Etats-Unis dans les années ’70 (spectacle créé au festival Cratère Surfaces d’Alès, en juillet 2014).

DurerMelancholiaILe projet MELANKHOLÍA (du grec μελαγχολία) est un questionnement combatif autour de la maladie que semble subir notre monde occidental depuis des siècles : la mélancolie.